Dans la vie quotidienne des campagnes et de certaines villes colombiennes, la violence constitue une expérience tangible, du rétrécissement des possibilités de transit et de circulation jusqu'aux déplacements et fuites forcés, des rumeurs aux histoires familiales de disparitions et de morts violentes. La multiplication et la dissémination d'acteurs armés aux objectifs de moins en moins formulés verbalement, l'effacement de limites claires entre criminalité commune et insurrection idéologique, la fragmentation croissante de pouvoirs armés aux alliances changeantes, la délégitimation, par faiblesse de l'Etat, des moyens institutionnels non violents de résolution des conflits, ces facteurs ont progressivement transformé un état sociopolitique de violence armée partisane récurrente, mais sélective et sectorielle, avec des acteurs identifiés et étiquetés, en un état de terreur qui brouille tout repère identitaire, territorial et éthique, et finit par imposer à la société la mort précoce et violente, pour soi et pour autrui, comme horizon commun de l'existence et grille privilégiée d'interprétation pour déchiffrer et doter de sens les événements et les personnages de la vie sociale. La particularité de la violence multiforme colombienne, par rapport à d'autres situations actuelles de terreur, comme, en Algérie ou en Afghanistan par exemple, réside, depuis une dizaine d'années, dans l'absence de discours, d'espaces et d'acteurs violents mettant en oeuvre des mécanismes de transnationalisation et de globalisation des conflits. En effet, les pratiques violentes des divers acteurs ne touchent guère les nations limitrophes ou lointaines, ni des victimes appartenant à d'autres pays. De même, aucun des rares discours légitimant la terreur exercée ne renvoie aujourd'hui à des références religicuses ou politiques transnationales dans la construction de l'identité subversive, comme l'islam, l'idéologie communiste, ou l'anti-américanisme. Parallèlement, discours et pratiques ne construisent aucune image d'un ennemi ni d'un allié au-delà des frontières ou étranger, ni n'inscrivent le conflit dans un contexte d'antagonisme supralocal, politique ou religieux. Cette absence d'une dimension globalisante qui constitue la singularité de l'état de terreur colombien diffuse un sentiment de solitude collective, représentée comme le stigmate d'un particularisme excluant les colombiens du monde extranational. Ethnologue, École pratique des hautes études V, section (EPHE), Paris.
Since the early 1990s, armed actors have invaded territories in the Chocó and Antioquia departments of Colombia, inhabited by Afro-Colombians and Indians whose collective rights in these territories had recently been legally recognised. Based on long-term fieldwork among the Emberá Katío, this article examines social, cosmological and ritual alterations and re-organisation around violent death. Following a national policy of post-conflict reparations, public exhumations and identifications of human remains reveal new local modes of understanding and administration. In particular, suicide, hitherto completely unknown to the Emberá, broke out in a multitude of cases, mostly among the youth. Local discourse attributes this phenomenon to the number of stray corpses resulting from the violence, who are transformed into murderous spirits which shamans can no longer control. The analysis focusses on the unprecedented articulation of a renewed eschatology, the intricate effects of an internal political reorganisation and the simultaneous inroad into their space of new forms of armed insurrectional violence. Thus the article will shed light on the emergence of a new transitional moral economy of death among the Emberá.
La société noire de la zone de D ibulla (côte caraïbe de Colombie) ne relève ni du modèle des sociétés ma rrons isolées, ni de celui, a uj ourd 'hui courant, de l'e thnicité ou du néo-traditionalisme religieux de type afr icain, ni des fo rmes identita ires interactives dé-territori alisées du milieu urbain. E lle est constituée de réseaux de parentèle multipolaires et en lutte factionnelle virtuelle, dont l'a ncrage territo rial est à la fo is matrifocal et reli gieux, grâce au culte territori al des saints et des morts. Le régime de mémoire et d 'histori cité et l'organisation socio-politique, qui débordent les frontières ethniq ues, régionales el natio nales, fo nt de cette société l' illustration d 'une forme de sociabilité fro ntalière, non communa uta ire el no n identita ire, rarement étudiée par l'a nth ropologie, el qui est peut-être une facelle caractéristique des cultures caraïbes. MOTS c uis : Marrons, résea ux socia ux, Colombie, région caraïbe, identi té afro-américai ne, rela ti ons interethniques. De ci111arrones a colonos y contrabandislas: redes 11111ltipolares y c01!f'ig11raciones 111estizas en la zona dibullera del Caribe colo111bia110 * E PH E, Section des Sc iences re li gieuses, 47, rue des Écoles, 75005 Paris.
Los dos sistemas de agresión de los Embera — el sistema chamánico, que se mani- fiesta a través de un ritual multiforme activo, y el sistema guerrero que ha desaparecido como práctica social efectiva pero se expresa рог medio de una gesta mítica cohérente — sugieren que si un sistema de agresión esta intimamente ligado a un modo de organiza- ción social de otro sistema étnico, en cada uno de ellos se puede manifestar otra propie- dad estructural latente del mismo. De este modo, los diferentes dominios de la agresión embera, lejos de poder ser reducidos unos a otros o ser resumidos metafóricamente en el complejo guerrero, hablan (y actuan) en dos ámbitos diferentes en los que los objetivos, los adversarios y los modos de acción de uno son ignorados por el otro. Los dos sistemas de agresión analizados revelan las relaciones inter-étnicas asi como también las vinculaciones entre los sub-grupos al interior del grupo. Al mismo tiempo remiten a fragmentos diferentes pero complementarios de una teoria, en parte implicita, de la persona humana y del cosmos, teoria que parece enfocar la agresión como fuerza motriz de transformación, por el ajuste entre si de sus multiples modalidades.
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