sérieuses sans doute, puisqu'elles nous reprochent notre légèreté, n'éprouvent quelque mécompte dans l'espérance qu'elles ont de gagner la faveur du monde par de tout autres procédés que ceux qui ont réussi jusqu'ici. Une science pédantesque en sa solitude, une littérature sans gaieté, une politique maussade, une haute société sans éclat, une noblesse sans esprit, des gentilshommes sans politesse, de grands capitaines sans mots sonores, ne détrôneront pas, je crois, de sitôt le souvenir de cette vieille société française, si brillante, si polie, si jalouse de plaire. Quand une nation, par ce qu'elle appelle son sérieux et son application, aura produit ce que nous avons fait avec notre frivolité, des écrivains supérieurs à Pascal et à Voltaire, de meilleures têtes scientifiques que d'Alembert et Lavoisier, une noblesse mieux élevée que la nôtre au XVII e siècle et au XVIII e siècle, des femmes plus charmantes que celles qui ont souri à notre philosophie, un élan plus extraordinaire que celui de notre Révolution, plus de facilité à embrasser les nobles chimères, plus de courage, plus de bonne humeur pour affronter la mort, une société en un mot plus sympathique et plus spirituelle que celle de nos pères, alors nous serons vaincus. Nous ne le sommes pas encore. Nous n'avons pas perdu l'audience du monde. Créer un grand homme, frapper des médaillons pour la postérité n'est pas donné à tous. Ce qui se fait sans les Athéniens est perdu pour la gloire... » Un ami allemand de Renan s'offusqua, dans une lettre qu'il lui adressa, de ce passage de son discours académique. Le philosophe répondit par une lettre que le Journal des Débats publia le 16 avril 1879. Nous l'avons jointe à son dossier. Il tenait que l'Allemagne, et non lui-même, avait renié sa foi. Recevant à l'Académie française, le 27 mai 1882, Victor Cherbuliez, Genevois descendant d'émigrés français qui était revenu à sa Patrie lors de [p. 21] la défaite, il déclarait : « Nous n'avons rien à dédire de ce que nous avons dit. Nos éloges sont sans repentance. Ce que nous avions aimé était vraiment aimable. Nous n'avons pas changé nos jugements sur Goethe ou Herder. Est-ce notre faute si, en restant fidèles à nos anciens jugements, nous nous trouvions dépaysés en présence de ce que l'on proclame maintenant comme un nouvel idéal ? Ceux qui se sont plaints de la sévérité de Valbert (pseudonyme de Cherbuliez) n'oubliaient qu'une chose, C'est qu'il ne dit rien sur l'Allemagne qu'il n'ait appris à son école. Oui, je ne crains pas de le dire, Monsieur, c'est votre ancienne éducation allemande qui vous a fait Français en 1870, c'est ce haut idéalisme de Kant et de Fichte qui vous a donné la force de regarder en face le succès, de le critiquer, de vous constituer par libre choix l'avocat des vaincus. » Germanophile qui s'entêtait à espérer contre toute espérance que sa vieille « maîtresse », l'Allemagne, redeviendrait telle qu'elle lui était apparue avant 1870, Renan disait, parlant d'elle : « Hais comme devant aimer un jour. » Il ne faut pas s'étonner dès lors qu'il ait vu...
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