Dans les migrations Sud-Nord, les jeunes hommes occupent une place prépondérante. Leur irruption dans l'espace public dépasse largement le cadre des pays du Sud et déborde dans les espaces des pays du Nord. Une des manifestations patentes de cette présence réside aussi dans leur mobilité qui traduit notamment une démarche conquérante de nouveaux mondes. Désir ardent et presque obsessionnel de mobilité auquel des cours tragiques mettent parfois fin de manière brutale, à l'instar du « demi-suicide » des deux jeunes garçons guinéens morts de froid dans le train d'atterrissage de l'avion qui devait les « arracher » à leur pays pour les conduire vers l'Europe. Comment qualifier un tel acte dont les auteurs ont cherché à expliquer le sens dans un pamphlet testamentaire en même temps que sorte de manifeste de la jeunesse du continent ? Aujourd'hui, la propension migratoire semble présente chez tous les jeunes du continent et concerne même des catégories encore dans l'adolescence. Dans certains pays du Sahel (Mali, Mauritanie, Sénégal), massivement la jeunesse des villes vient rejoindre celle de contrées rurales au passé migratoire plus ancien dans un projet commun : partir au Nord. Jamais projet n'a rencontré autant de suffrages au sein d'une jeunesse tant urbaine que rurale et nourri autant de rêves, de fantasmes et d'imaginaires. Bien que plus ou moins soutenus dans cette initiative par leurs familles et les parents déjà partis, la démarche d'émigrer n'en est pas moins discrète, parfois solitaire et secrète. Partir pour « fuir la misère » et l'injustice, découvrir le monde, échapper à un univers étriqué, faire fortune, se former…, les mobiles qui guident les acteurs sont divers et multiples. Pourtant, il est difficile de dire que le migrant est l'affamé confronté au dilemme existentiel : partir ou mourir. Au demeurant, ceux qui sont soumis à une telle alternative ne partent généralement pas, faute de pouvoir le faire, et périssent sur place à moins qu'une opération humanitaire ne les sauve in extremis. Quelle souffrance, sans doute aussi forte que la faim, anime donc ces jeunes qui prennent la voie de l'exil au prix parfois de leur vie avec comme credo : réussir ou y rester ? Car on est loin souvent des situations de misère extrême. Prise en charge Autrepart (18), 2001 : 37-49 * Chercheur associé au Centre d'études africaines (CEA-EHESS), Paris.
Parmi les immigrés d'Afrique de l'Ouest, dans les années qui ont suivi la fermeture des frontières, la socialisation des hommes seuls n'a pu se faire que par le biais du travail ou au sein des foyers. Ensuite, avec le regroupement familial, l'intégration de ces migrants est passée par la vie associative, dynamisée par le rôle social des femmes puis par les luttes des "sans-papiers". Victimes de ségrégations multiples, les ressortissants d'Afrique subsaharienne n'ont pas attendu qu'elle les invite pour forcer la main de la démocratie française, en interrogeant l'essence même de la citoyenneté et en revendiquant l'égalité entre nationaux et étrangers.
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