Sexualité et religion constituent deux champs bien définis de la sociologie comme de l’anthropologie. Leur articulation a été pensée au sein de divers travaux dont la coloration historique indique l’importance de situer dans le temps l’entreprise de réflexivité. Les pratiques et les représentations – et partant les analyses qui peuvent en être faites – s’avèrent en effet étroitement liées au contexte dans lequel elles s’inscrivent. Deux angles d’approche se distinguent dans la littérature existante. Le premier concerne l’étude des représentations et des pratiques sexuelles des individus déclarant une appartenance religieuse. La perspective quantitative est privilégiée comme guide de recueil et d’analyse des données, parfois dans une perspective comparative, pour comprendre comment la dimension religieuse s’agence avec la dimension sexuelle (Maître, Michelat, 2002). Le second angle d’approche se focalise sur des prescriptions et des restrictions en matière d’activité sexuelle telles qu’elles sont diffusées au travers des textes fondateurs des trois grandes religions monothéistes. Nourries d’une forme d’exégèse, les réflexions s’attachent alors à comprendre comment les acteurs interprètent les textes et se situent par rapport à eux pour organiser et vivre leur activité sexuelle. Il s’agit là de comprendre comment la dimension sexuelle s’agence avec la dimension religieuse dans les parcours biographiques (Sèvegrand, 1995 ; BuissonFenet, 2004 ; Rochefort, Sanna, 2013 ; Tricou, 2015).
Lieu caractérisé par la coercition, la prison est couramment associée à l’exercice d’une sexualité spécifique proscrite et hautement contrôlée. Appréhender les établissements pénitentiaires comme des espaces sociaux invite cependant à remettre en cause cette assertion au travers de l’examen des liens unissant la sexualité du dedans à celle du dehors. Cette approche s’avère particulièrement féconde pour l’étude de la sexualité en prison de femmes, laquelle se comprend à la lumière de trois processus : confortation et remise en question des modèles de conduites traditionnellement assignés aux femmes, importation et exportation des normes restreignant l’exercice de l’activité sexuelle, et discipline et autocontrôle exercés sur les conduites sexuelles. La prison de femmes apparaît ainsi comme un puissant relai du modèle contemporain légitime de sexualité féminine.
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