Le phénotype de la dyskératose congénitale (DC), ou syndrome de Zinsser-Cole-Engman [1], est très variable d'un patient à l'autre et, pour un patient donné, évolutif au cours du temps. La description précise du phénotype a été grandement facilitée par la mise en place en 1995 par l'équipe d'Inderjet Dokal à Londres d'un registre international de la DC [2]. Ce registre associe des données cliniques détaillées et des prélèvements sanguins pour les membres malades ou asymptomatiques de 270 familles.-La forme typique de la DC est caractérisée par des atteintes cutanées, phanériennes et muqueuses : aspect réticulé et hyperpigmentation (mélanodermie) de la peau associé à des zones d'atrophie, dystrophie des ongles (présence de stries, de déformations, réduction de taille voire absence totale des ongles) et leucoplasies des muqueuses, en particulier au niveau de la cavité buccale [3][4][5][6]. Les signes cutanés apparaissent en général avant l'âge de 10 ans. -Les patients peuvent aussi développer un retard statural, une perte précoce de cheveux ou l'apparition prématurée de cheveux blancs, un larmoiement anormal (épiphora), des anomalies dentaires, une ostéoporose précoce, une cirrhose du foie, des sténoses de l'oesophage, des atteintes neurologiques (retard de déve-loppement, microcéphalie, atteinte cérébelleuse), une fibrose pulmonaire et un déficit immunitaire global [3,6] (Tableau I).-Au moins 80 % des patients développeront une pancytopénie secondaire à une aplasie médullaire. Cette aplasie médullaire apparaît le plus souvent lors de la seconde décade de la vie. -Enfin, près de 10 % des patients seront atteints de cancers -principalement cancers de la peau, des muqueuses, de l'oesophage -ou d'hémopathies malignes, leucémies ou lymphomes. > La dyskératose congénitale (DC), ou syndrome de Zinsser-Cole-Engman, est une maladie héré-ditaire, trop souvent létale, décrite pour la première fois sur le plan dermatologique par Zinsser en 1906. Il s'agit d'une maladie très polymorphe sur le plan clinique, variable dans son mode de transmission et dont certains symptômes cliniques apparaissent tardivement, rendant son diagnostic clinique difficile. À cette hétérogé-néité clinique est associée une hétérogénéité génétique : on sait que plusieurs gènes, quatre étant identifiés à ce jour, sont impliqués ; néan-moins, pour la majorité des patients, le gène en cause n'est pas connu. Le point remarquable est que les quatre gènes connus (DKC1, hTERC, hTERT et NOP10) codent des composants de la télomérase tous impliqués dans le maintien de la longueur des télomères, faisant de la DC un modèle clinique unique pour la compréhension du rôle et de l'importance de la télomérase et des télomères. En outre, les protéines codées par les gènes DKC1 et NOP10 sont également des composants des particules dites H/ACA impliquées dans la synthèse des ribosomes et des ARN messagers matures. Des altérations de ces deux processus pourraient contribuer aux symptômes des patients atteints de DC due à des mutations de DKC1 ou NOP10. <